À propos d'écriture de chanson
Les mots sont à la fois enveloppe et substance, coque et pulpe, fond et forme.
Forme par leur caractère, leur structure, leur accent tonique, leur sonorité, leur couleur même ; fond par leur sens possiblement pluriel, leur étymologie autrement dit leur racine et sève, leur chair, leur vécu, leur savoir.
Écrire est cette recherche d’unité entre fond et forme, entre ce qui raisonne et ce qui résonne.
Au plus les mots ont raisonné en nous, au plus peuvent-ils résonner peut-être au-delà de nous.
Le faiseur de chanson de ce point de vue est un marcheur. Pas à pas, mot à mot, note à note, il avance. Destination en tête, il cherche son rythme, souffle et tempo, s’écarte, revient, déblaie, coupe, taille, aplanit, ajuste le trait, le tracé. Et regarde, fouine, cueille, creuse, marche en découvrant, découvre en marchant, hume et inspire, se laisse inspirer, observe, scrute, écrit. Et se réjouit, d’un plaisir souvent gage d’une avancée dans la bonne direction.
À chaque obstacle son passage, sa solution ; si talent il y a, il est de les trouver, sans dévier.
À l’arrivée, au bout de la marche, comme une odeur de cuisine au seuil de la maison.
Elle fleure bon dès l’intro, la bonne chanson
MS
D’abord l’idée. Le cuisinier qui dans une marmite enfourne ses ingrédients sans avoir mijoté l’idée de son plat va au devant d’une étrange bouillie.
L’angle ensuite. Tout, peu ou prou, a déjà été cuisiné, on ne peut rechercher que des manières différentes de préparer, accommoder, amener à point dans une assiette des mêmes ingrédients de base. Il s’agit alors de trouver une direction, celle qui éloigne du mets recuit, de la recette éculée.
Le reste, tout le reste, est travail encore. Une route plus ou moins longue, plus ou moins âpre, qui dans tous les cas requiert un point de départ, deux ou trois étapes, un point d’arrivée. Ce tracé d’un itinéraire constitue une sorte de trame, un canevas, une charpente, un squelette qui donne à la démarche sa cohésion, sa cohérence, sa tenue.